Une bande de chasseurs de vampires au service du Vatican travaille de nos jours au Nouveau Mexique. Ils vont affronter Valek, le premier et le plus puissant des vampires...
Pendant les années 90, on remarque que le film de vampires est un genre qui a eu dans l'ensemble le vent en poupe. Ainsi Dracula (1992) de Francis Ford Coppola, Entretiens avec un vampire (1994) de Neil Jordan et Une nuit en enfer (1996) de Robert Rodriguez ont proposé des versions de cette mythologie qui ont séduit le grand public et les connaisseurs. Et n'oublions pas la très populaire série TV Buffy contre les vampires qui a commencé en 1997 ! D'autre part, Los Angeles 2013 (1996) de John Carpenter, coûteuse séquelle de son New York 1997 (1981), n'a pas remporté le succès escompté par ses producteurs. Carpenter accepte donc ensuite une tâche plus modeste avec ce Vampires : ce travail de commande est l'adaptation d'un roman de John Steakly, et semble vouloir profiter de l'engouement pour les films de ce genre. Carpenter (qui n'a jamais caché son admiration pour des réalisateurs comme Howard Hawks (La captive aux yeux clairs (1952)...) ou Sam Peckinpah (Pat Garret et Billy the Kid (1973)...)...) dira avoir accepté ce scénario car il lui offrait l'opportunité de réaliser un western. Les rôles principaux sont tenus par James Wood (Vidéodrome (1983) de David Cronenberg, Il était une fois en Amérique (1984) de Sergio Leone...) et Sheryl Lee (la Laura Palmer de la série TV Twin Peaks...).
Vampires a beau se passer à l'époque actuelle, l'atmosphère est définitivement celle d'un western dans lequel des cow-boys (les chasseurs) traqueraient des indiens (vampires) : on a même le droit à une scène de saloon avec son shérif local qui peste contre les excès des mercenaires (transposée pour l'occasion dans un motel). L'action se déroule alors dans de vastes paysages américains et dans des villes typiques du far west, avec fermes, hôtels glauques et prisons. La musique, même si elle contient quelques clochettes évoquant la musique de Suspiria (1977) de Dario Argento, est essentiellement composée d'un gros rock bien lourd, illustrant plus un folklore de cow-boys machos qu'une atmosphère horrifique. Pourtant, Carpenter nous rappelle qu'on est bien dans un film de vampires en colorant son image de dominantes sanguines : rochers du désert, ciel crépusculaire et sang des victimes versé en abondance par les créatures de la nuit baignent l'histoire dans une atmosphère teintée de rouge.
On remarque aussi que c'est la première fois que Carpenter s'intéresse aux vampires. Ici, cette culture est assez développée et nous est décrite avec beaucoup de détails. On apprend ainsi les origines de ces créatures, leur organisation et l'existence d'une conspiration dangereuse et complexe pour l'humanité au sein même de l'Eglise catholique : les amateurs de Vampire la mascarade ne se sentiront pas dépaysés. On note aussi de grandes similitudes avec Une nuit en enfer de Robert Rodriguez : le cadre géographique, les massacres très gores, à la limite de la parodie, les maquillages des vampires (réalisés dans les deux films par l'équipe KNB)...
On peut tout de même regretter que Vampires se révèle être un peu inégal. Certes, il contient des scènes d'action impressionnantes dans lesquelles Carpenter démontre son sens très sûr du découpage dans l'espace et le temps (le massacre du motel, les scènes de chasse au harpon...). De même la relation entre le chasseur Montoya et la vampire Katrina est très attachante. Pourtant, les séquences violentes sont parfois ridicules et peu efficaces (l'attaque du monastère laisse même flotter un petit parfum de série Z indigne de Carpenter...). Le duo formé par Jack et le jeune prêtre donne lieu à des gags fastidieux et parfois même à la limite de la sottise. On regrette encore le manque de rigueur et de rythme de la narration, parfois alourdie par des bavardages ennuyeux. Le final est extrêmement décevant : le prince des vampires est très facilement vaincu !
Pourtant, malgré ces défauts, le miracle Carpenter a encore lieu : certes, ce n'est qu'une œuvre de commande expédiée avec un budget modeste sur un scénario imposé, mais l'ensemble reste tout de même agréable à suivre, et certaines visions étonnantes, efficaces et inventives (les vampires sortant du sol au crépuscule, ou s'enflammant au soleil...) valent à elles seules le détour : Vampires n'est pas un chef d'œuvre, mais ce n'est pas non plus un mauvais film.